Max Payne


MAX PAYNE

Réalisé par John Moore
Écrit par Beau Thorne




Bon éclairons de suite le débat (on verra qu’on en a besoin) : bien qu’il soit adapté d’un jeu vidéo, il n’est pas nécessaire d’être un gamer patenté pour juger de la valeur du film de John Moore. En fait, c’est plutôt du goût du spectateur pour le film noir dont il est question, noir dans tous les sens du terme (on doit pouvoir compter sur les doigts d’une main les minutes de soleil présentes dans le film).

Noir dehors et noir dedans, car Mark Wahlberg joue un homme si dévasté que l’on est pas très sûr de vouloir explorer les tréfonds de son âme…Noir comme l’endroit où il travaille, département des affaires classées où l’ambiance et l’humeur (noire !) de ses membres sont à cent lieues de Cold Case…Noir comme les pistes successives où l’entraîne le seul but, désormais, de sa vie : découvrir le ou les assassins de sa femme et de son enfant…Noir, enfin, comme les ailes de ces étranges créatures qui semblent jalonner le parcours du (anti-) héros à mesure qu’il progresse.
Attention néanmoins à ne pas se méprendre : on ne tient pas là un personnage de Raymond Chandler version post-moderne. Mais plutôt un mix entre les trois héros principaux de Sin City : les tourments de Hartigan, le look de Dwight et le côté « foncer seul contre tous » de Marv (mais pas les biceps). Le style lui-même présente quelques discordances avec les canons du genre : effets spéciaux (réussis) qui évoquent Constantine et point de vue subjectif des balles qui rappellent Wanted, héroïnes qui sont plus proches de la punkette urbaine que de la « femme au porte-cigarette » classique, ennemi rappelant plus le méchant de jeux vidéo (de fait) que l’homme au costume à 500 $.
Car c’est avant tout un film hybride, dont l'esthétique l'est aussii : les amateurs de « gun-movies » (ou de son pendant vidéoludique, le shoot’em up) le trouveront inhabituellement crépusculaire et angoissant (gare au sursaut quand paraît la Walkyrie !) et ceux qui adorent précisément le côté obscur de la Force pourront trouver que cela défourraille un peu trop.
En conséquence, et c’est peut-être le seul défaut majeur du film, c’est que dans une telle entreprise de synthèse de genres, ou bien on produit un chef-d’œuvre qui englobe les genres, ou bien on ne fait que tous les effleurer sans contenter aucune des différentes fractions des puristes (si ardus à contenter par ailleurs).
Au final, une bonne synthèse qui n’approfondit aucun de ses objets, mais néanmoins un bon polar, rare par sa condition de film à suspense parfaitement anxiogène tout en comportant des fusillades dignes de ce nom.
A absolument déconseiller aux mélanophobes (= peur du noir).

Cyril Schalkens

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