Musée haut, musée bas


MUSÉE HAUT, MUSÉE BAS


Écrit et réalisé par Jean-Michel Ribes




Un peu de légèreté pour un moment de détente ? Jean-Michel Ribes, directeur du théâtre du Rond-Point, adapte sa pièce Musée haut, musée bas au cinéma avec un casting pharaonique. Les saynètes burlesques s’enchaînent, inégales, pendant une heure trente pas désagréable mais sans transcender pour autant.

On l’avait compris, le film se passe au musée, havre de paix et de perfection aseptisée. A l’extérieur, la Nature: les crapauds, les cafards, la végétation, le déluge. Cependant, le musée ne saurait exister sans les visiteurs, créatures – s’il en est – de la Nature. Foulant les escaliers et les étages sans fins du musée, chacun arrive avec sa propre histoire, ses problèmes, ses désirs, ses attentes. Sous la houlette du conservateur (Michel Blanc), obsédé par l’élimination de toute trace de Nature (obsession bien vaine étant lui-même un élément des plus « naturels »), tout ce petit monde s’agite – et se pavane ? – pour faire apercevoir qui il est. Dans ces conditions, à travers leurs parfois courtes apparitions, difficile de les rendre tous intéressants. Malheureusement, si certains attisent notre curiosité, d’autres sont d’un caricatural quelque peu exaspérant…

Certains passages, vraiment drôles, questionnent particulièrement l’art contemporain. Tout est-il de l’art à partir du moment qu’un être humain l’a pensé et appliqué ? L’image de l’orgueil de l’artiste qui va contre les lois de la nature, comme celui qui étrangle sa mère pour l’exposer, évitent avec justesse le ridicule et soulignent avec décalage le côté parfois parfaitement risible de la recherche artistique sur-intellectualiste. On aimerait voir plus longtemps Yolande Moreau en spécialiste de l’art africain qui découvre un clandestin dans ses paquets exportés, Fabrice Lucchini en gardien de musée dont la vie est bouleversé par les expositions du musée, ou encore le génial Dominique Pinon, qui dans les sous-sols du musée manipule avec ses collègues les précieuses œuvres d’art.

Mais on passe rapidement à d’autres sujets, plus traînants et caricaturaux. J’aimerais particulièrement souligner qu’il existe des grands musées importants en « province » et que les « provinciaux » ne s’habillent pas forcément comme des ploucs en affichant des airs hébétés… . L’obsession du conservateur devient assez vite insupportable elle aussi. C’est d’ailleurs la (seule) ligne qui fait dérouler l’histoire en s’intensifiant jusqu’à outrance. La Nature finit par envahir complètement le musée et l’emporter dans un déluge apocalyptique – réalité ? Cauchemar du conservateur ? On peut y percevoir aussi une petite pique adressée aux écologistes abusifs. A noter aussi les petites apparitions de Jean-Michel Ribes, sortes de signatures à la Hitchcock, plutôt sympathiques.

On termine tout de même sur un assez bon final, bien qu’à vouloir s’écarter trop de l’intellectualisme pour le populaire, Ribes laisse tomber plusieurs bonnes idées pour leur préférer l’anecdotique – certes drôles, mais qui ne laisse pas un souvenir impérissable. Un sentiment partagé donc au milieu de toutes ces virevoltes et ce tourbillon de couleurs. Alors « beaucoup d’agitation pour rien » ? Peut-être, mais l’agitation n’est pas toujours désagréable.


Ana Kaschcett

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