Le Plaisir de Chanter


LE PLAISIR DE CHANTER


Réalisé par Ilan Duran Cohen





Quel meilleur décor pour une histoire d’espionnage, d’amour, de naïveté, de maternité, de dépression, d’insatisfaction, de rencontre avec soi-même et avec les autres, qu’un cours de chant lyrique dans la pièce exigüe d’un appartement parisien ? Sexe, mensonge, manipulation, humour et chanson, Ilan Duran Cohen ose -et il le fait bien- un délicat mélange des genres, avec l’adresse d’un funambule toujours à la limite du déséquilibre.

Porté par une flopée de comédiens surprenant dans leur contre-emploi, ce film nous fait passer un bien agréable moment. Un riche homme d’affaire détenant des informations compromettantes est assassiné. Sa veuve (Jeanne Balibar), une naïve bourgeoise, est soupçonnée d’avoir reçu de son défunt mari les informations sur une clé USB. Cette idéaliste un peu gourde rêve quant à elle de devenir chanteuse de variété, mais prend des cours de chant lyrique, plus au goût de son mari. C’est précisément dans ce cours que vont s’infiltrer deux agents français (Marina Foïs et Laurànt Deutsch) afin d’approcher la cible. Cependant, on se rendra vite compte que le cours est entièrement peuplé d’espions venus de toute l’Europe avec une cible commune, la veuve.

L’intrigue principale –la mission des espions- devient certes vite un prétexte pour s’intéresser de plus prêt au personnage en eux-mêmes, car finalement l’inintérêt de cette mission est d’une certaine façon au service du mélange des genres et montre qu’au fond le seul vrai sujet est l’être humain et sa capacité à ne pas voir le plus court chemin vers le bonheur.

Certains rebondissements frisent l’aberration, d’autres tardent à venir pour finalement avoir lieu plus tard, à retardement. Bref, le spectateur ressent un étrange équilibre de l’implication dans l’action et de l’impuissance. Cela est surement du en grande partie au fait que pratiquement tous les plans sont filmés à hauteur d’homme, comme un plan subjectif qui nous place directement au milieu des personnages, en espion infiltré dans ces espaces exigües –rare sont les plans d’extérieurs, la séquence d’échange des otages sur le pont offre une ouverture qui trouble vraiment, les névroses internes réglées peut-on enfin s’ouvrir à l’extérieur, aux autres ?

On notera particulièrement les performances de Jeanne Balibar, celle que tout le monde connaît pour son intelligence et sa culture campe à merveille une veuve nunuche qui chante l’amour avec de grandes fleurs bleues, de Marina Foïs, qui interprète avec justesse et sobriété la trentenaire en pleine crise existentielle, et de Laurànt Deutsch, qui en toute simplicité incarne l’amoureux parfait -qu’on serait bien sûr tout autant que Marina Foïs incapable de remarquer tant il est simplement bien. Un plaisir qui donne envie d’être plus léger.

Ana Kaschcett

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