L’enfant de Kaboul


L'ENFANT DE KABOUL


Réalisé par Barmak Akram




Récit linéaire qui se déroule en 36 heures, L’enfant de Kaboul fait découvrir au spectateur une ville – et ses habitants – après 25 années de guerre. L’intrigue est en réalité prétexte à faire voir au public ces lieux qui se reconstruisent, ces hommes et ces femmes qui évoluent… la vie, la société.

Khaled est chauffeur de taxi. L’intrigue démarre lorsque qu’une femme voilée - qu’il prend pour une course - laisse sur la plage arrière son bébé, ne laissant pas au chauffeur le temps de la rattraper. L’enfant de Kaboul raconte ainsi les trois jours de ces deux destins liés : Khaled et « l’enfant de Kaboul », ce bébé abandonné (pour quelle(s) raison(s) ? …)

Khaled devient rapidement une sorte de guide, à travers la ville, pour le spectateur. Kaboul : une ville détruite : « Ça, c’est à cause des bombes américaines » indique l’un des personnages. Le spectateur devient ainsi le témoin des conditions de vie dans cette société qui tente de se reconstruire : ravages de la guerre, pauvreté, conditions de la femme… Il n’y a aucun pathos dans ce qui est montré ; les faits sont là, nul besoin d’en rajouter. Le réalisateur réussit à prendre une distanciation nécessaire qui, en plus de sensibiliser subtilement le spectateur, donne à ce film une valeur quasi documentaire (ce qui n’est pas étonnant lorsque l’on connaît le passé de documentariste de Barmak Akram).

Le spectateur découvre la réalité du couvre-feu - prenant conscience de ce que revêt cette obligation -, constate le « trop-plein » des orphelinats, la misère... C’est l’intérieur de la société qui lui est montrée.

Le poids de cette société se fait sans cesse ressentir. Khaled, par exemple, n’a pas de garçon, or c’est une honte de mettre au monde des filles. D’un coté donc, il y a lui, qui n’assume pas de ne pas avoir de descendant mâle, qui en souffre ; et de l’autre, sa femme, qui craint qu’il ne la quitte ou prenne une deuxième femme à cause de cela.

La question de la condition des femmes est un aspect très important – et on ne peut plus intéressant - du film. Lorsque Khaled dit à l’une de ses filles : « On va te marier. », celle-ci répond « Je ne veux pas parce qu’ils battent les femmes. ». De la même façon, il interdit à ses filles de donner à manger aux pigeons : c’est une tache dévolue aux hommes… Ces quelques exemples en disent déjà long. Cependant, tout n’est pas simple et au détour de ces « traditions », de ces habitudes, pointent également des signes de changement.

Le rapport à la religion est également présent, notamment lorsque la comparaison est faite entre ce bébé, ce garçon apparu – finalement - « de nulle part » et Moïse, abandonné sur les eaux.
Ainsi, de nombreuses – et nécessaires - questions se trouvent soulevées par ce film. Prétexte pour dépeindre une société en pleine (re)construction, L’enfant de Kaboul, sans réellement bouleverser, touche. C’est un spectateur dépaysé, satisfait d’avoir vu – un court moment – vivre une société qui lui était plus ou moins inconnue, qui sort de la salle.

Sonia Déchamps

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